EST-CE QUE JE VAIS POUVOIR L'ALLAITER AU-DELA DE 3 SEMAINES ?
La berceuse, KO
La maman qui nous appelle a un bébé de 5 jours. Elle s'interroge sur son allaitement, se demande si elle fait bien, si elle allaite comme il faut. Ainsi, elle explique que cette nuit vers 4 h, après avoir fait téter son bébé, elle a essayé de le poser, endormi, dans son lit mais il s'est réveillé, alors elle lui a finalement proposé une sucette. Dans la journée, elle voudrait essayer de le faire téter toutes les 4 heures, pour qu'il ait un rythme, mais en pratique il tète plus souvent. Le bébé régurgite un peu, parfois juste après la tétée, parfois un peu plus longtemps après, mais pas abondamment. La maman pense que c'est un trop plein de lait qui ressort. Par ailleurs, le bébé fait pipi et caca de façon satisfaisante et régulièrement. Il lui manque 100g avant d'atteindre son poids de naissance. Une sage-femme doit faire une visite demain pour le peser. Enfin, elle précise qu'elle n'a pu allaiter son fils aîné que 3 semaines et qu'elle craint de ne pas réussir à allaiter davantage cette fois-ci.
Au sujet de la sucette d'abord, son usage est fortement déconseillé chez le nourrisson allaité, avant plusieurs semaines. En effet, la sucette, comme la tétine du biberon, risque de perturber la succion, ce qui aurait pour conséquence une mauvaise prise du sein avec éventuellement des douleurs, voire des crevasses, et enfin une baisse de la production de lait. Cette maman est informée sur le sujet. Apparemment, pour le moment, la sucette qu'elle donne très ponctuellement à son bébé quand elle estime qu'il tète pour trouver le sommeil n'a pas de conséquences négatives sur l'allaitement. Cependant, je complète son information en précisant l'importance de rester vigilante dans les jours et les semaines à venir. Si les "périodes sucette" sont trop fréquentes, la quantité de lait produite peut se réduire car les seins risquent d'être moins stimulés à des moments cruciaux de forte croissance du bébé.
En ce qui concerne les écarts entre les tétées que la maman souhaiterait mettre en place, cela représente également un risque pour le processus de lactation. Effectivement rien n'est linéaire pour un bébé en pleine croissance qui a régulièrement besoin de relancer la production de lait pour qu'elle s'adapte à ses nouveaux besoins. Imposer des horaires est contraire et nuisible à la bonne mise en route de l'allaitement et à l'harmonie entre la production de lait et les besoins du bébé. Beaucoup de mamans pensent qu'elles doivent respecter des horaires pour une meilleure digestion : avec le lait maternel c'est heureusement inutile puisqu'il est rapidement digéré ! Aussi, quand on ne sait pas pourquoi le bébé semble insatisfait, il est simple de proposer une tétée : le bébé sera parfaitement capable de montrer si cela lui convient ou pas. S'il ne veut pas téter, il signalera à nouveau son insatisfaction, et peut-être que le portage pourra combler son besoin, à moins que ce ne soit une envie de faire pipi ou caca qui le dérange et à laquelle on peut également répondre en le tenant au-dessus d'une bassine ou des toilettes. Ce dernier point peut surprendre certaines lectrices, et pourtant le bébé est bel et bien conscient aussi de ses besoins d'éliminer et peut le signaler.
Quoiqu'il en soit, cette maman se sent à l'écoute de son bébé, elle le dit clairement, mais parfois elle ne sait plus trop si ce qu'elle fait est adapté. Le doute est bien légitime quand on est maman ! Et c'est justement grâce à toutes ces questions qu'elle se pose qu'elle peut trouver des réponses adaptées. Mais malgré cette attention à son bébé, elle a peur de ne pas pouvoir l'allaiter plus que son fils aîné, et cette pensée la perturbe. Après lui avoir posé quelques questions, elle parvient à identifier les raisons pour lesquelles elle a cessé l'allaitement de son premier enfant avant la fin du premier mois. Notamment, elle souligne le fait que son bébé avait une succion peu efficace dès la naissance et réalise qu'aux alentours de 3 semaines, son bébé était très demandeur, alors elle n'a pas réussi à continuer à avoir confiance en son allaitement et à donner des compléments.
La première poussée de croissance, le premier mois de vie du bébé, aux alentours de 3 semaines, est parfois une épreuve qui se solde par un sevrage précoce, malgré le désir de la maman. Si elle n'a pas été informée sur l'utilité de ces tétées fréquentes, mais surtout et essentiellement si elle n'est pas soutenue et encouragée face à la demande intense de son bébé qui la réclame à corps et à cris, et qui ne veut que son contact et ses seins, cette période peut être rédhibitoire pour l'allaitement. C'est ce qui est arrivé à cette maman lors de son premier allaitement. Et j'apprends ensuite que c'est également ce qui est arrivé à sa propre mère qui ne la pas allaitée plus de 3 semaines..., et c'est aussi ce qui est arrivé à sa sœur qui a sevré son bébé exactement à la même période... Comme si l'histoire se répétait... La crainte est forte pour cette maman de risquer de reproduire ce schéma alors même qu'elle est en possession des informations qui devraient lui permettre d'aller au-delà de cet écueil... Si elle parvient à franchir ce cap, elle aura gagné en confiance en elle pour la suite de son allaitement c'est certain, comme une force féminine supplémentaire.